Leurs chantiers sont évidemment nombreux, à commencer par celui de la dématérialisation, dont ils doivent gérer les impacts en cascade sur leur fonctionnement. Toutefois, leur transformation ne s’opère pas en vase clos. Elle a des conséquences, directes ou indirectes, sur d’autres acteurs publics et privés. Ces conséquences deviennent importantes à anticiper et à maîtriser pour ne pas créer des effets de bords dommageables.Plus important encore, la révolution numérique ne sera réelle qu’avec de véritables collaborations transverses. Autrement dit, il faut faire mieux que la somme de petites transformations localisées.Par exemple, les projets les plus ambitieux de « Territoires Intelligents » nécessitent la cohésion et la coordination de nombreux acteurs. Les métropoles et les intercommunalités se mobilisent donc pour atteindre ce nouvel équilibre commun.
Certaines transformations ne sont possibles qu’avec une taille critique » – Constance Nebbula, conseillère communautaire pour Angers Loire Métropole, déléguée au numérique, à l’innovation et à la smart city
« Certaines transformations ne sont possibles qu’avec une « taille critique ». L’action de la métropole est donc essentielle, au-delà de ce que peut décider de faire une commune à son niveau par exemple »explique ainsi Constance Nebbula, à la fois conseillère municipale à Angers et conseillère communautaire pour Angers Loire Métropole, déléguée au numérique, à l’innovation et à la smart city. L’élue est intervenue le 5 décembre 2018 lors d’une session du Club des Partenaires du Numérique, à Paris, pour expliquer ce qu’impliquait le plan de transformation de son territoire et le lancement de son marché « Territoire Intelligent » pour 2019. Elle a notamment insisté sur la mobilisation de toutes les forces locales, et sur la mobilisation de toutes les infrastructures pour « fédérer ce qui se fait de meilleur chez nous ».
Un besoin toujours plus fort de cohésion
Cette action de transformation pensée à l’échelle d’un territoire « écosystème » est également perçue du côté de l’Etat. D’un point de vue politique, cette vision a été incarnée par la nomination en octobre 2018 lors du dernier remaniement de Jacqueline Gouraud, comme ministre de la Cohésion des territoires et des relations avec les collectivités locales. Cette sénatrice, maire jusqu’en 2014 d’une commune du Loir-et-Cher, doit en effet permettre de rétablir un lien solide entre l’Etat et les territoires alors que de nombreux grands projets de transformation de l’écosystème public sont impulsés par les institutions centrales, à l’image de la dématérialisation des factures autour du portail Chorus Pro. D’un point de vu plus pratique, l’Etat compte aussi sur les acteurs pionniers pour transmettre aux autres les axes clés de certains changements structurants. Dernier exemple en date, autour d’un changement majeur, éminemment centralisé mais affectant tous les établissements : le prélèvement à la source. Ainsi, la métropole de Lille a non seulement montré l’exemple en 2018 en matière de PASmais est aussi allée à la rencontre de ses pairs pour faciliter leurs transformations en la matière. Un écosystème qui se transforme facilite aussi au maximum les partages et retours d’expérience.
La relation avec les acteurs privés évolue
Mais au-delà des impulsions de l’Etat et de ses préoccupations politiques, les acteurs publics voient leurs relations avec tous les expertsde la transformation numérique être revues en profondeur. Les pures relations « prestataires-clients » ne sont plus désirées, d’un côté comme de l’autre, car les transformations en cours impliquent une proximité et une adaptation rapide, itérative sur les projets qui sied mieux à de véritables partenariats. L’état de l’art en matière de technologies pousse d’ailleurs les prestataires du numérique et « en particulier les éditeurs de logiciels à s’adapter en ce sens »,comme le souligne Hélène Barrios,Directrice Générale de eksaéPublic. Et face à l’innovation galopante de certaines start-up qui s’adressent en direct à leurs citoyens, parfois en confrontation avec les services publics, de plus en plus de territoires revoient leurs réflexes culturels, leurs modes d’interactions et ce qu’ils sont prêts à offrir à leurs partenaires. Interrogé sur les mêmes questions que Constance Nebbula le 5 décembre, Thomas Bonhoure, directeur de l’aménagement et du développement économique de l’agglomération de Versailles, résumait ainsi : « Que ce soit en travaillant avec Air Liquide ou en passant un accord avec Waze, nous devons avant tout créer une dynamique avec tout un écosystème, public et privé. […] Il faut sortir de la posture traditionnelle de la « commande publique » et faire l’apprentissage de nouveaux indicateurs, de nouvelles façons de mesurer la valeur, ou encore être prêt à faire du « troc » avec de nouveaux partenaires pour faire bouger les lignes ». Une ambition qui pourrait d’ailleurs aller beaucoup plus loin qu’un changement de posture sur des sujets comme la dématérialisation ou le territoire intelligent. « Ce constat de l’importance de travailler autrement à l’échelle territoriale est particulièrement vrai quand on parle d’innovation sociale et environnementale. Il faut voir quelles sont les priorités et difficultés de toutes les parties prenantes à l’échelle d’un territoire pour pouvoir atteindre un traitement général qui aura un réel impact » notait ainsi André Jaunay, responsable des pôles initiatives métropolitaines Grand Paris, lors de l’Université européenne de l’innovation publique territoriale 2018. En la matière, les bonnes habitudes prises pour l’innovation numérique, s’avèreront fortement utiles aux autres axes de l’action territoriale.
Pour aller plus loin :
Transformation numérique : 3 accélérateurs pour réussir en écosystème