La crise a été un catalyseur de transformation. Ainsi, le pilotage de la performance financière et des risques (financiers, retards d’approvisionnement) est devenu plus complexe pour les Directions Financières. Tous les acteurs du service public ont dû s’adapter sans transition à un contexte inédit en vue d’assurer la continuité de services mis à disposition des citoyens. Aujourd’hui, il s’agit pour les Directions Financières de projeter l’après-crise. L’intervention de l’État a en effet permis d’accélérer la reprise. Comment accompagner la sortie de crise ?
La budgétisation est devenue un exercice particulièrement complexe au vu des incertitudes actuelles. Comment définir au mieux le budget, contrôler et piloter efficacement les coûts d’une organisation publique en 2022 ? Pistes de réponse.
Des résultats qui priment sur les moyens
La loi de finances (dite « LOLF) » a favorisé un modèle inspiré du privé : la gestion par la performance. « Chaque politique publique se voit allouer des crédits, mais également des objectifs assortis d’indicateurs pour en évaluer la réalisation. La budgétisation par programme est désormais tournée vers les résultats de l’action publique et non vers les moyens matériels et humains qu’elle met en œuvre », précise la neuvième édition de l’ouvrage « Les Finances publiques », publié par la Documentation Française2. Ainsi, les ressources des différentes organisations publiques sont aujourd’hui corrélées à des objectifs chiffrés, dont la progression est suivie et évaluée.
Ce détachement d’une logique historique a impacté le métier de la finance publique. En complément, avec la crise, de nouveaux enjeux sont venus se greffer à cette transformation. Le DAF doit composer avec une multiplicité d’aléas et de risques pour anticiper des résultats. Pour autant, avec sa vision transverse et sa capacité à projeter les résultats attendus de divers scénarios, il dispose d’une légitimité certaine pour fédérer l’ensemble des fonctions opérationnelles et support de l’organisation, en fixant des objectifs communs. Cette capacité à faire collaborer des talents complémentaires constitue un atout majeur, favorisant le positionnement du DAF en amont des projets.
L’élaboration budgétaire : priorité n°1 ?
Etre DAF du service public consiste à embrasser une fonction bicéphale. Deux casquettes se superposent :
- la fonction régalienne : produire les données, tenir la comptabilité, faire approuver les comptes par le commissaire aux comptes, gérer la trésorerie, trouver des financements, faire en sorte que les procédures mises en place dans l’organisation soient conformes aux exigences réglementaires (entre autres fiscales)…
- le pilotage de la performance économique & financière : aider les opérationnels à gérer efficacement les activités. Ici, le DAF se positionne en tant qu’expert-visionnaire : la valeur ajoutée de la fonction réside dans cette capacité à recommander les meilleures options.
A ces responsabilités majeures viennent s’additionner des missions annexes : gérer les talents de son équipe, optimiser l’organisation du travail et les processus transactionnels, maîtriser les risques…
Fort de solides capacités d’écoute et d’un sens avéré de l’innovation, professionnel disposant d’une véritable force de proposition et de conviction, le DAF doit se porter garant de la bonne mise en œuvre de réformes structurelles de l’organisation de l’action publique. Et ceci passe nécessairement par l’élaboration budgétaire.
Le Directeur Financier, via la construction budgétaire, est un acteur clé de la transformation publique !
Anticiper demain avec prudence et résilience
Le DAF joue un rôle de partenaire des dirigeants du service public, en facilitant la lisibilité des informations financières. Aussi, il convient de définir de nouveaux indicateurs de performance (KPIs), qui n’avaient pas encore lieu d’être jusqu’alors. De plus, les prévisions budgétaires doivent s’accompagner de prudence : une révision mensuelle des projections s’impose pour mener des actions correctives, le cas échéant.
La finance est présente dans tous les domaines du service public, la trésorerie est une ressource qu’il est impératif de piloter avec fiabilité et anticipation. Avec la mise en place du télétravail dans l’urgence, il a fallu inventer un nouveau mode de travail collaboratif à distance : il n’est pas envisageable de rompre le lien avec la Direction Financière, quel que soit le service concerné. L’expertise du DAF consiste également à identifier des axes d’optimisation tangibles pour les lignes opérationnelles. Il s’agit là de chantiers très structurants pour l’organisation publique. Le DAF contribue concrètement aux projets financés, le métier restant le pilote du projet.
Pour préparer et exécuter le budget de manière résiliente, un double enjeu doit être pris en compte : la simplification et la sécurisation des processus. Parmi les pistes pour simplifier les processus, le DAF peut travailler sur les sujets suivants :
- gestion de la comptabilité : suppression des doubles règlements ;
- flux de validation : réduction des délais observés ;
- dématérialisation ;
- révision des processus back office ;
- gestion des décaissements : suivi plus précis du paiement des fournisseurs…
La sécurisation des processus passe par l’accompagnement des métiers. La DAF doit aider les fonctions à piloter leurs activités et à bâtir des plans d’action : la mise en place d’automatismes de gestion participe à fluidifier les échanges et facilite la mise en place des projets. De fait, il convient de veiller en continu à la parfaite conformité des opérations réalisées avec les règles fiscales, les normes comptables…
En améliorant et en sécurisant les processus, le DAF prépare efficacement l’organisation publique à faire face à toute potentielle nouvelle crise.
- Diminuer le niveau de détail requis
- Cadrer avec davantage de précision les processus (pilotage, guidelines…)
- Recourir à un outil de datavisualisation financière
- Réviser les référentiels sources
- Diminuer le nombre d’itérations lors de la production des données prévisionnelles
En synthèse : observer hier pour imaginer demain
Pour 2022 et au-delà, il est indispensable d’analyser et de décrypter ce qu’il s’est passé durant la crise, de remettre le bilan à plat. Il est intéressant d’isoler ce qui a bien fonctionné et de faire un focus sur les imprévus qui ont mis en difficulté l’organisation. La sécurisation des vulnérabilités identifiées lors de la crise est un gage de réussite pour demain !
Dans un second temps, pour préparer au mieux la reprise d’activité, deux défis majeurs sont à relever.
D’un côté, le DAF doit structurer son budget en fonction des résultats attendus, tout en intégrant la composante risque dans son travail de projection. Son rôle consiste à équilibrer les liquidités avec les besoins à venir : le besoin en fonds de roulement est difficile à appréhender, le comportement des citoyens et fournisseurs étant complexe à anticiper. Ici, le recours à la méthode Agile prend tout son sens.
- Se concentrer sur les agents et leurs interactions : il est intéressant de réviser le rythme des échanges avec les directions métiers, en optant pour des interactions plus courtes mais plus fréquentes. Cette action peut être renforcée par la désignation d’un référent unique pour chaque service interne, sur l’ensemble de ses enjeux financiers.
- Aligner les priorités de la Direction Financière sur celle des autres fonctions de l’organisation publique. La DAF doit prendre en compte les priorités des métiers en vue de mieux les intégrer dans sa gestion quotidienne.
En parallèle, il sera intéressant pour les Directions Financières de valoriser les actifs clés. Ainsi, certains agents se sont « révélés » durant la crise. Un engagement particulièrement remarquable démontre un potentiel fort qu’il convient de prendre en considération ! De la même manière, les ressources humaines investies sur des sujets transverses sont des acteurs clés de la transformation : s’appuyer sur des talents constitue un levier précieux pour faciliter la conduite du changement !
Pour rappel, les directions financières publiques ne sont jamais en charge du haut de bilan : elles ne réalisent pas d’opération de fusion-acquisition et gèrent très rarement des placements sur les marchés financiers. D’autre part, les « livrables » sont difficilement quantifiables ; aussi est-il plus complexe d’évaluer la valeur ajoutée. On ne peut faire progresser que ce que l’on peut évaluer : la définition des objectifs et d’indicateurs pertinents sont donc indissociables d’une bonne construction budgétaire.
Le DAF est celui qui « traduit les idées en termes financiers » ; il est ainsi en position de les challenger. Le Directeur Financier de demain arbitrera habilement les projets de transformation grâce à sa capacité à mesurer et à anticiper les impacts financiers des différentes options.
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