Fin des dérogations. Depuis le 1er janvier 2022, les collectivités doivent impérativement appliquer la règle des 1607 heures de travail annuel. Ainsi, de nombreux dispositifs ont été pensés en vue de permettre aux agents du service public d’être en conformité avec leur temps de travail légal. Quelles nouvelles pratiques ont vu le jour ? Qu’est-t-il possible de mettre en place pour s’adapter aux contraintes professionnelles ou personnelles ? Tour d’horizon des impacts du passage au 1 607 heures.
1 607 heures : les origines de ce quota
La loi n° 2001-2 du 3 janvier 2001 relative à la résorption de l’emploi précaire et à la modernisation du recrutement dans la fonction publique ainsi qu’au temps de travail dans la fonction publique territoriale a fixé la durée hebdomadaire du travail à 35 heures.
Pour autant, les collectivités territoriales bénéficiaient, en application de l’article 7-1 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, de la possibilité de maintenir les régimes de travail mis en place antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi susmentionnée.
Jusqu’à la publication de l’article 47 de la loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique ! En effet, ce dernier a introduit le principe d’un retour obligatoire aux 1 607 heures annuelles de travail à compter du 1er janvier 2022. Il sonne ainsi le glas des régimes plus favorables. Pour mener à bien ce projet, un délai d’un an avait été accordé aux collectivités et établissements publics à compter du prochain renouvellement général des assemblées délibérantes des collectivités territoriales pour délibérer.
Enfin, les seules dérogations possibles[1] à ce dispositif relèvent de réductions du temps de travail, applicables dans des cas précis :
- modulation importante du cycle de travail,
- accomplissement de travaux nocturnes ou en horaires décalés.
- réalisation de travaux pénibles ou dangereux.
1 607 heures : partir du bon pied
Alors comment appliquer les 1607 heures ? De nombreuses organisations publiques ont choisi de définir de nouvelles règles concernant la réalisation des heures de travail. La comptabilisation du temps de travail n’était pas toujours très claire pour certains corps de métiers :
- le temps d’habillage doit-il être comptabilisé comme tel ?
- quelles étaient les règles à prendre en compte en cas d’annualisation du temps de travail ?
En adoptant la norme des 1 607 heures, les Services RH en ont profité pour remettre à plat l’existant et harmonisé les pratiques en place dans les différentes entités. Autre enjeu d’importance, nombreux sont les DRH ayant choisi de mener une analyse plus poussée du fonctionnement des services en vue de mieux maîtriser le recours aux heures supplémentaires.
Temps de travail à respecter, temps de travail à mesurer !
Plusieurs mesures peuvent être adoptées en vue d’évaluer de manière juste le temps de travail effectué par les agents du service public.
L’option la plus évidente concerne les outils de GTA (gestion des temps et activités), se matérialisant sous la forme de badgeuses physiques ou numériques (déclenchées par l’utilisation d’un ordinateur).
Lorsque l’enregistrement des temps est connecté au SIRH, les Services RH & les agents profitent d’une fiabilisation de la gestion des temps :
- les heures travaillées sont directement impactées sur la paie,
- les agents peuvent consulter en temps réel leurs heures supplémentaires, leur solde de congés…
Avec ces outils, le suivi du temps de travail est plus simple et efficace. Les agents en télétravail sont assurés que leur activité soit bien enregistrée, par exemple.
Pour les métiers qui ne se prêtent pas à ce type d’organisation, l’annualisation peut être une alternative intéressante. En effet, certaines fonctions connaissent des pics d’activité saisonniers en alternance avec des périodes plus creuses. Dans ce cas précis, l’annualisation des 1 607 heures permet une gestion plus agile d’un rythme de travail atypique.
Au rayon atypique, on trouve aussi les horaires ! Le travail peut s’effectuer la nuit, le dimanche, autant de cas qui pouvaient déclencher une indemnité pour horaire atypique. Il convient pour les Services RH d’analyser précisément les droits des agents en vue de leur applique le régime indemnitaire auquel ils peuvent prétendre : indemnités de sujétion et d’expertise, de fonctions…
1 607 heures = dégradation des conditions de travail ?
Quelle est le meilleur choix : un cadre de travail strict visant à garantir l’égalité pour l’ensemble des agents ou une agilité favorisant l’épanouissement personnel ? La réponse n’est pas si évidente. Suivant les contextes et les enjeux, chacune de ces stratégies RH peut présenter des atouts.
Ainsi, en France, le passage aux 1 607 heures a conduit à l’adoption de nouveaux règlements du travail particulièrement hétérogènes au sein des collectivités.
On distingue les organisations faisant la part belle aux horaires variables, avec la possibilité de moduler sa semaine (4 ou 5 jours), d’annualiser, de travailler entre 35 et 40h par semaine… Les agents sont responsabilisés dans leur pratique : l’organisation de leur temps de travail doit servir les intérêts de la collectivité et s’adapter à leurs préférences personnelles. Dans cette situation, les détracteurs pointent du doigt l’émergence de risques psychosociaux liés au manque de repère. Sentiment de perdition ou d’injustices peuvent également apparaître, l’équité parfaite étant parfois difficile à mettre en place, tant les cas individuels peuvent présenter de spécificités.
A contrario, d’autres organisations ont fait le choix d’établir un cadre plus strict pour l’organisation du temps de travail. En établissant des limites, les collectivités s’assurent que le fait d’appliquer les 1607 heures ne conduise pas à des situations inconfortables pour les agents. En effet, trop de permissivité peut conduire à des aberrations, désorientant les agents soucieux de bien faire. Les horaires variables ne conviennent pas à tous les agents ! Des solutions plus normalisées peuvent répondre au besoin d’agilité : horaires différents en été et en hiver, par exemple.
1 607 heures et RTT, quelles solutions possibles ?
Les RTT peuvent constituer un levier d’ajustement du temps de travail. En optant pour une politique RH adaptable, les agents profitent d’une meilleure organisation de leur temps de repos. Le collaborateur sera d’autant plus efficace durant son temps de travail !
Voici quelques exemples de dispositifs pouvant être adoptés au sein d’une collectivité :
- définition de différents cycle de travail pour les agents qui enregistrent leur temps de travail (le nombre de RTT varie alors en fonction de la durée hebdomadaire du travail)
- récupération des heures supplémentaires par période trimestrielle…
Appliquer les 1607 heures : à chacun sa politique RH !
En fonction des enjeux et du contexte de votre organisation publique, la mise en place des 1 607 heures peut s’accompagner d’adaptations mineures ou de changements plus profonds.
Dans tous les cas, cette nouvelle obligation a mis en lumière l’importance de la gestion du temps de travail des agents du service public. De nombreuses interrogations ont été soulevées, des cas spécifiques ont dû être passés au crible.
En 2023, un premier (et rapide) retour d’expérience permettra d’opérer des ajustements et, pourquoi pas, de proposer de nouveaux dispositifs pour gagner en efficacité !
[1] Source : décret n° 2001-623 du 12 juillet 2001, art. 2.